Dans un arrêt du 29 mars 2023, n°21-18052, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le régime probatoire des heures supplémentaires.

Dans cette affaire, une salariée réclamait le paiement d’heures supplémentaires en s’appuyant sur trois décomptes qui indiquaient uniquement le nombre d’heures effectuées chaque jour et ne comportaient pas d’indication quant aux horaires d’embauche et de débauche de la salariée ni à ses temps de pause.

La Cour d’appel avait considéré que ces décomptes étaient insuffisants à étayer la demande en rappel de salaire au motif que ces éléments ne sont pas suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement. La Cour ajoutait qu’une mesure d’expertise ne peut être ordonnée pour suppléer la carence de la salariée.

La Cour de cassation casse cet arrêt et juge que la Cour d’appel a ainsi fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, et a violé l’article L 3171-4 du code du travail.

La Cour de cassation explique qu’aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, l’employeur tient à la disposition de l’agent de contrôle de l’inspection du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

La Cour de cassation ajoute que selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

La Cour de cassation en conclut qu’il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Ainsi, un décompte d’heures supplémentaires produit par un salarié faisant apparaître le nombre d’heures réalisées chaque jour suffit pour que l’employeur ait à justifier, en défense et s’il veut s’opposer à la demande, du décompte précis des horaires de travail accomplis par le salarié.